Ecce Homo du seizème siècle. La statue provient du monument funéraire de l'abbesse Nicole de Dommartin, décédée en 1529.

                              L'ecce homo de 1529


"C'est à tout cela que pense Claudette, en passant devant l'ecce homo qui orne le monument funéraire de l'ancienne abbesse. Depuis qu'elle est toute petite, la jeune fille ne manque jamais de s'apitoyer sur le Christ livré. Celui-ci se tient debout, les poignets liés contre le ventre, devant quelques bougies qui se consument. Les détails de son expression soulignent les souffrances qu'il éprouve en portant la part des malheurs de chaque habitant. Il y en a tellement en ce moment ! Les mains crispées par la douleur  agrippent le tissu doré, enroulé autour des hanches. Le front est ceint d'une couromme d'épines. Le corps dénudé est seulement revêtu d'un drap rouge à revers bleu, tenu au niveau des épaules par une fibule dorée. Les deux extrémités de l'agrafe sonr ornées d'un soleil d'or semblable à celui de la voûte. La tête est inclinée à droite, les yeux sont clos et les lèvres serrées. Le visage, peint en gris rosé est empreint de cette indicible angoisse que provoque l'imminence du supplice attendu."

Cet extrait de la Sorcière de la Vologne (chapitre 1, p. 21) correspond à l'année 1547. Il rappelle qu'au seizième siècle, la satue de l'Ecce Homo se trouvait dans la basilique Saint-Maurice d'Epinal. Actuellement on peut la contempler dans la chapelle Saint-Michel de cette ville.
Un ecce homo, expression latine qui signifie "voici l'homme", est une représentation du Christ juste avant sa crucifixion, au moment où le procurateur romain de Judée Ponce Pilate  le livre à ses bourreaux.

La statue symbolise les souffrances de la ville d'Epinal lors de la première moitié du seizième siècle. En effet, de 1529 à 1530, elle a été frappée par une terible épidémie de peste.
En 1547,Epinal connaît de nouveaux troubles liés à la conversion au protestantisme de certains habitants. Des actes iconoclastes sont perpétrés. On retrouvera dans les fossés les statues mutilées de saint Cosme et de saint Damien.
L'image du Christ livré s'est imposée à Claudette Clauchepied, la sorcière de la Vologne, pendant les moments douloureux de sa vie. ,

                         Le nouement de l'aiguillette
                Missel de 1617 : le rituel de l'exorcisme est consigné sur la page de droite
    
" Comme de coutume, les futurs mariés se sont arrêtés sous le narthex. Avant d'entrer dans la nef, il faut laisser le temps à l'officiant de prononcer l'exhortation rituelle contre un éventuel charmeur ou noueur d'aiguillette.

        - Combien que, de droit, tous sorciers et sorcières, charmeurs et charmeresses soient excommuniés de l'autorité de monsieur Toussaint de Hossey, notre évêque et pasteur, nous dénonçons pour excommuniés de fait ceux ou celles qui, par noeud d'aiguillette ou autrement, prétendent empêcher la consommation du mariage entre ces deux personnes qui sont ici présentes...

Le curé y met tout son coeur. Il faut bien chasser les sorciers, actuellement si nombreux dans la région."
 Cet extrait de La sorcière de la Vologne (chapitre 12, p. 146)   link peut surprendre un lecteur non averti. Il décrit pourtant une pratique avérée aux seizième et dix-septième siècles. Les mots de la prière, prononcée à l'entrée de l'église de Champ-le-Duc sont authentiques.
A cette époque, les futurs mariés craignent particulièrement qu'un noueur d'aiguillette ne leur jette un mauvais sort et empêche la consommation de leur mariage.

Plusieurs questions se posent :
- Que signifie le mot aiguillette ?
- Quelles sont les conséquences d'un nouement de l'aiguillette ?
- Quelle est la formule magique qui permet de nouer l'aiguillette ?                     Eglise romane de Champ-le-Duc (XIe-XIIe siècle)

                  
L'aiguillette était une sorte de lacet, ferré aux extrémités. Sa fonction était de maintenir fermée la braguette d'un pantalon.

Le nouement de l'aiguillette est bien entendu une expression imagée qui évoque un maléfice particulièrement craint. Et on le comprend puisque ses conséquenses sont irréversibles ! L'impossibilité magique de dénouer la braguette de son pantalon conduit la victime à l'impuissance sexuelle. Dans le meilleur des cas, le nouement de l'aiguillette provoque seulement un dégoût pour les relations sexuelles. Par conséquent, ce mauvais sort est particulièrement redouté par les jeunes mariés.
Cela explique aussi que le curé de  Champ-le-Duc mette autant de coeur à réciter sa prière.
Voici un exemple tiré des archives de Meurthe-et-Mosellelink. Le document est coté B8691 et daté de 1603. Il concerne deux jeunes mariés de Saint-Blaise dans les Vosges. Ils racontent que l'inimitié entre eux s'est manifestée "aussy tost leur mariage consommé et continuerent en ceste pouvreté, se haissant l'ung et l'aultre estrangement." Les mot étrangement et pauvreté qu'ils emploient pour qualifier leur absence de relations sexuelles montrent qu'ils en attribuent la cause à un mauvais sort.

Il existe plusieurs façons de mettre en oeuvre ce maléfice. J'ai longuement hésité avant de vous livrer les formules et les vieux gestes magiques qui permettent de nouer l'aiguillette de son ennemi. En effet, bien que le secret soit très ancien, il a conservé toute son efficacité. J'ai fini par me décider à faire confiance à votre sagesse et votre raison. Voici donc ce secret magique en français actuel.

1ère façon : pour ceux qui n'ont pas encore été mariés : Une aiguillette dans les mains, réciter à l'envers l'un des versets du psaume Miserere me Dominus. Prononcer ensuite par trois fois le prénom et le nom des deux nouveaux mariés, en formant un noeud la première fois, la seconde en le serrant un peu et la troisième en le nouant tout à fait et en disant pour combien de temps, on veut qu'il soit noué.

2e façon : pour ceux qui ont déjà été mariés : On noue l'aiguillette lorsque le prêtre bénit l'anneau. Il faut ensuite prononcer les prénoms et les noms des nouveaux époux au moment où moment où l'époux glisse l'anneau sur l'annulaire de la nouvelle épouse.

3e façon : Tourner les mains en dehors et entrelacer les doigts les uns dans les autres, en commençant par le petit doigt de la main gauche et en continuant ainsi jusqu'à ce qu'un pouce touche l'autre. Et cela lorsque l'époux présente l'anneau à son épouse dans l'église.

4e façon : Faire un noeud à une aiguillette ou à une corde en dsant Ribald et en traçant une croix sur ce noeud. Puis dire Nobald en faisant un second noeud et une seconde croix. Et enfin dire Vanarbi en faisant une troisième croix et un troisième noeud dans le temps que le prêtre bénisse les anneaux.

5e façon (la moins évidente à mettre en oeuvre à notre époque) : Lier la verge d'un loup en prononçant les noms et prénoms d'un nouveau marié et d'une nouvelle mariée.